Résumé

Suivre, en conditions extrêmes et en 3D, l’effet de la minéralogie sur la déformation des roches

Influence de la fraction des phases secondaires sur la rhéologie et la fabrique des roches des zones de subduction

Modéliser l’évolution de la terre à travers les temps géologiques, comprendre la mécanique des zones de subduction à l’échelle régionale depuis les séismes jusqu’à la convection, nécessite de quantifier la viscosité des roches à l’interface entre la plaque en subduction et le coin de manteau surplombant. Les minéraux constituant les roches à cette interface ont des propriétés plastiques et élastiques différentes. Les mécanismes de déformation, et la rhéologie de la roche, se modifient selon les proportions de minéraux résistants mécaniquement et ceux plus déformables.

L’objectif principal de MADISON était d’étudier expérimentalement l’influence de ces contrastes mécaniques sur la fabrique et la rhéologie des roches. Les résultats peuvent ensuite être intégrées ou comparées à des modèles numériques d’agrégats polyphasés, rhéologiques, ou servir pour l’interprétation des microstructures naturelles.

Fabrique in-situ par tomographie d’absorption de rayons X synchrotron et partitionnement des contraintes in-situ par diffraction de rayons X

Des agrégats biphasés représentant les roches cibles, dans lesquels des contrastes mécaniques forts ou faibles peuvent exister, ont été étudiés (Serpentine-olivine et Grenat-Pyroxene), pour différentes proportions de phases faibles mécaniquement dans l’agrégat et différents taux de déformation, sous haute pression et haute température (3-5 GPa, 350 à 850°C).

La répartition des contraintes et l’évolution des fabriques ont été obtenues avec des mesures in-situ par rayonnement synchrotron. La tomographie d’absorption de rayons X permet d’imager l’organisation spatiale des deux phases, de caractériser la fabrique et de quantifier la connectivité de la phase secondaire. La diffraction de rayons X a permis de quantifier la répartition des contraintes entre les deux phases, et de déduire les modalités de cette répartition (phase forte supportant les contraintes, vs. zones interconnectées de phase faible mécaniquement contrôlant la déformation).

Les échantillons de départ, les microstructures, et les mécanismes de déformation à l’échelle du minéral post-mortem, ont été caractérises par microscopie électronique, à balayage et en transmission sur la plateforme de microscopies électroniques de l’Université de Lille et de l’Institut Chevreul.

Résultats et retombées principales du projet

Le résultat le plus marquant concerne les agrégats olivine+serpentine représentant les péridotites serpentinisées. Sur ces assemblages à fort contraste de résistance mécanique, nous montrons un seuil critique de fraction volumique entre 10 et 20%, aussi bien pour l’évolution de la fabrique (Mandolini et al, soumis) que pour la distribution des contraintes (Hilairet et al. 2024). Ce seuil sépare des comportements et fabriques dominés par la rhéologie de l’olivine, de comportements dominés par la rhéologie de la serpentine, même potentiellement pour des taux de déformation modestes (e.g. 20%).

Le projet a permis d’amorcer le développement, et l’application, de techniques de déformation sous haute pression (> 2 GPa) couplées à la tomographie synchrotron (Mandolini et al, 2023). Ce projet a également inclus la transmission des savoirs et savoir-faire acquis ou pertinents au projet, par des cours, des ateliers et des encadrements de stages et doctoral. Le plateau hautes pressions de Lille  a également acquis une presse Paris-Edinburgh équipée pour la torsion (RoPEc) pour poursuivre des développements d’expériences en torsion ex-situ.